Mon
entrée en circadie !
Après
plusieurs hésitations pour me décider sur le choix de mon objectif
cette année, c'est encore Hervé qui aura la solution et trouvera
les bons mots pour me convaincre : me voilà embarquée dans
l'aventure des championnats de France des 24 heures.
Vendredi
13 septembre, nous y sommes, Saint-Maixent-l’Ecole, en cette veille
de course, nous arrivons en début d’après-midi pour récupérer
le dossard et choisir le barnum où nous nous installerons le temps
de la compétition. Nous choisissons le dernier en bout de ligne
droite. Nous y serons à trois avec des personnes que nous ne
connaissons pas encore. Nous repérons le tour, les toilettes, la
ligne de passage, la ligne de départ et nous rentrons. Le lendemain
après une bonne nuit de sommeil, nous nous levons tranquillement et
nous nous préparons pour rejoindre le stade.
Nos
deux co-locataires du jour sont déjà arrivés et le moins que l'on
puisse dire c'est qu'ils se sont installés à l'aise, ce qui agace
Hervé ! Mais nous trouvons vite à nous organiser.
9h30,
le breafing d'avant course est donné en présence de tous les
coureurs. La boucle fait précisément 1268,4 mètres, il y a une
très légère montée mais surtout un belle descente d'environ 20
mètres qui risque fort de taper dans les jambes avec le temps. Nous
observons les autres participants, certains ont l'air rodé, nous
sommes en pleine découverte et
ne connaissons personne.
Sur
la ligne de départ, personne ne sautille. Il faut garder toute son
énergie pour la course. Le temps est ensoleillé et la température
agréable.10h,
le départ est lancé, la joyeuse troupe de coureurs s'élance
tranquillement. Je prends rapidement mon petit rythme de croisière
comme cela était prévu. Très rapidement, les tours s ’égrènent,
je suis plutôt régulière dans mes allures entre 7’00 et 7’30
au tour, je suis à peu près à la quarantième place dans le
peloton, c'est parfait. Comme prévu à partir du 20ème kilomètre,
je fais de petites pauses toutes les heures. Le marathon arrive dans
le 34ème tour, environ 4h de course, j’ai repris une dizaine de
place et les temps sans pause sont toujours réguliers. Au 50ème
tour soit 6h03, je pointe à la 22ème position !
Le
soleil tape bien et je troque mon habituel bandeau pour une casquette
et des lunettes de soleil d'autant que le parcours ne comporte pas de
zones d'ombre. Je sens que je suis moins bien, à partir du 56ème
tour, la cadence diminue et je passe la barre des 7’30 au tour pour
augmenter progressivement vers les 8’30. Je souffre de la chaleur
même si Hervé veille à l'alimentation et surtout à l’hydratation.
Certaines pauses s'allongent exagérément même si Hervé veille.
J'ai un point au milieu du dos, j’ai
l’impression de courir avec un poignard planté entre les
omoplates. Hervé en profite pour me masser le dos et essayer de
décontracter les épaules,
les jambes aussi sont lourdes. Pour palier aux pensées négatives,
je passe en revue ma joyeuse troupe de graphos. Un à un, je pense à
eux, je vois leurs sourires, leurs grimaces, leurs manières de
courir et cela me fait du bien. Les tours et les kilomètres
s'enchaînent, le soleil baisse sur l'horizon et la température
diminue. Après 10h20 de course, il est maintenant 20h20, je passe le
100ème kilomètre, je suis 24ème et 6ème femme. Le micro s'éteint
pour la nuit, c'est maintenant le silence qui règne sur la course.
Le coup de moins bien est passé, la douleur au dos a disparu, les
jambes ne se font plus sentir. Je n'ai plus mal nulle part ! Je
reprends confiance et Hervé me booste. Le coup de mou est passé. Le
jour baisse et il faut penser à se couvrir, la nuit risque d'être
froide. Je mets un coupe-vent.
À
partir de là, les tours vont se suivre régulièrement et avec
confiance. Seuls les tours avec une pause sont plus longs, tous les
autres passent entre 8’00 et 8’30. Je suis décontractée si bien
que certains spectateurs s'en aperçoivent. Cécile, du club de
Boulogne, me lance ”tu as avalé un métronome ! ”. Petit à
petit, je grappille
des places 21ème après 91 tours (11h59),
19ème après 107 tours (14h32),
17ème après 114 tours (15h31),
encore une place au 135ème tour, 13ème au 139ème (19h29).
J'ai repris deux filles et je suis maintenant 4ème femme et les
autres devant commencent aussi à être en difficulté. Cela me
rassure et me met en confiance. Je continue sur le même rythme, sans
fléchir et surtout parfois en repassant sous les 8 minutes au tour.
Je
me freine moi-même, peut-être ai-je eu tort mais j’avais trop
peur de ne pas tenir à un rythme plus soutenu.
Vers
6h30, le jour se lève et la température est très basse mais le
thermomètre remontera assez rapidement. Certains concurrents sortent
de leurs siestes réparatrices et reprennent la course. Il y a plus
de monde et il faut rester attentive aux écarts des uns et des
autres. Hervé m'encourage, la 3ème a craqué elle aussi. Je la
rattrape et la double maintenant, il faut continuer pour atteindre
l'objectif initial de 210km. La barre des 200km est franchie au
158ème tour après
22h22 de course. Le speaker a repris son micro et le stade s'anime.
Les spectateurs affluent pour la fin de l'épreuve et les
encouragements sont plus nombreux. Je sens qu’Hervé jubile sur le
bord de la piste. Je suis à la 11ème place du général !
Les
vingts dernières minutes arrivent, les organisateurs donnent à tous
les coureurs une marque avec leur numéro de dossard, elle permettra
la mesure exacte de la distance parcourue. Plus que 10 minutes, un
peu plus d'un tour, je continue sur ma lancée. Lorsque le premier
coup de pistolet est tiré, il ne reste plus qu’une minute,
l'émulation est à son comble chaque participant ”accélère”
autant qu'il peut pour grappiller
un ou deux mètres supplémentaires. Le deuxième coup est tiré, 24h
! Çà y est c'est fini, je pose ma marque au sol. C'est la
délivrance, je suis exténuée mais tellement heureuse d'avoir
réussi. Hervé arrive tout de suite pour me soutenir, les jambes
fléchissent.
La
marque finale est de 214,725 km.
Je
suis 3ème femme et championne de France M3.
Je
suis circadienne
!